L'huile d'argan, un nectar rare et précieux venu du Maroc
Guillaume Crouzet
Le Monde, 6 avril 2003
Le Monde, 6 avril 2003
« Il y a encore dix ans, quand on cherchait le mot «argan» sur un site Internet, on aboutissait presque toujours à Molière, ou plus exactement à son personnage du Malade imaginaire. Aujourd'hui, faites l'essai, vous verrez que vous allez beaucoup plus rapidement débarquer au Maroc. » Celle qui s'exprime ainsi, Fatimine Kydjian, a fondé en France la maison Argania, pionnière de l'importation et de la diffusion de l'un des plus rares et des plus précieux produits marocains : l'huile d'argan.
Ce nectar vendu aujourd'hui à prix d'or dans quelques épiceries fines et magasins biologiques, provient-il pour autant d'un arbre rare ? Absolument pas. On trouve trace de l'arganier sur plus de 800 000 hectares dans le Sud-Ouest marocain. Sauvage et épineux, il affectionne les territoires arides de l'Atlas, où il fait depuis longtemps partie de l'économie villageoise. Son bois sert de combustible, ses feuilles de nourriture pour les chèvres, et ses fruits à la fabrication de cette huile délicate. Enfin, « ses fruits », c'est aller un peu vite en besogne ! Contrairement à l'olive, auquel le fruit de l'arganier ressemble d'ailleurs, ce n'est pas de la pulpe pressée qu'on extrait l'huile en question. Le travail est en réalité beaucoup plus fastidieux.
Entre juin et août, les Marocains récoltent les fruits mûrs et tombés à terre (l'arganier ne doit pas être gaulé). Ces fruits sont mis à sécher plusieurs semaines au soleil, puis les femmes se chargent, entre deux pierres, d'enlever la pulpe de fruit et de casser la noix contenue à l'intérieur - une noix réputée seize fois plus solide que celle de la noisette - pour en extraire enfin de précieux amandons oléagineux. L'opération n'est pas finie pour autant. Ces amandons sont mis à chauffer quelques minutes dans des plats de terre cuite. A la suite de cette légère torréfaction, ils sont ensuite broyés à la meule de pierre. Pour donner leur huile ? Toujours pas. On obtient seulement à cet instant une pâte qui va elle aussi nécessiter un long travail manuel. Les femmes triturent pendant plusieurs heures d'affilée cette pâte dans de grands plats creux. A deux ou trois instants précis, elles ajoutent à la pâte des petites quantités d'eau tiède, ce n'est qu'au bout de ce long travail de malaxage qu'elles finissent par rendre ce mélange totalement sec pour en extraire jusqu'à la dernière goutte d'huile d'argan. La fabrication d'un seul litre aura nécessité 100 kg de fruits frais et 12 heures de travail. Au Maroc, ce précieux liquide est autant un produit de beauté pour la peau qu'une huile alimentaire. En France, certains laboratoires de cosmétologie comme Galénic ont créé une gamme de produit à l'huile d'argan, mais ce sont les chefs cuisiniers qui ont assuré sa notoriété. Son arôme puissant de musc et d'arachide grillée la fait employer à petite dose. En mariage avec les poissons, en finition dans le jus de cuisson d'un gigot d'agneau, d'un trait dans un bol de soupe de légumes ou sur une pizza, sortie du four.
Ce nectar vendu aujourd'hui à prix d'or dans quelques épiceries fines et magasins biologiques, provient-il pour autant d'un arbre rare ? Absolument pas. On trouve trace de l'arganier sur plus de 800 000 hectares dans le Sud-Ouest marocain. Sauvage et épineux, il affectionne les territoires arides de l'Atlas, où il fait depuis longtemps partie de l'économie villageoise. Son bois sert de combustible, ses feuilles de nourriture pour les chèvres, et ses fruits à la fabrication de cette huile délicate. Enfin, « ses fruits », c'est aller un peu vite en besogne ! Contrairement à l'olive, auquel le fruit de l'arganier ressemble d'ailleurs, ce n'est pas de la pulpe pressée qu'on extrait l'huile en question. Le travail est en réalité beaucoup plus fastidieux.
Entre juin et août, les Marocains récoltent les fruits mûrs et tombés à terre (l'arganier ne doit pas être gaulé). Ces fruits sont mis à sécher plusieurs semaines au soleil, puis les femmes se chargent, entre deux pierres, d'enlever la pulpe de fruit et de casser la noix contenue à l'intérieur - une noix réputée seize fois plus solide que celle de la noisette - pour en extraire enfin de précieux amandons oléagineux. L'opération n'est pas finie pour autant. Ces amandons sont mis à chauffer quelques minutes dans des plats de terre cuite. A la suite de cette légère torréfaction, ils sont ensuite broyés à la meule de pierre. Pour donner leur huile ? Toujours pas. On obtient seulement à cet instant une pâte qui va elle aussi nécessiter un long travail manuel. Les femmes triturent pendant plusieurs heures d'affilée cette pâte dans de grands plats creux. A deux ou trois instants précis, elles ajoutent à la pâte des petites quantités d'eau tiède, ce n'est qu'au bout de ce long travail de malaxage qu'elles finissent par rendre ce mélange totalement sec pour en extraire jusqu'à la dernière goutte d'huile d'argan. La fabrication d'un seul litre aura nécessité 100 kg de fruits frais et 12 heures de travail. Au Maroc, ce précieux liquide est autant un produit de beauté pour la peau qu'une huile alimentaire. En France, certains laboratoires de cosmétologie comme Galénic ont créé une gamme de produit à l'huile d'argan, mais ce sont les chefs cuisiniers qui ont assuré sa notoriété. Son arôme puissant de musc et d'arachide grillée la fait employer à petite dose. En mariage avec les poissons, en finition dans le jus de cuisson d'un gigot d'agneau, d'un trait dans un bol de soupe de légumes ou sur une pizza, sortie du four.