Mohammed Chafik : Un grand homme de culture et d’amazighité au Maroc
Rachid Najib Sifaw
Il semble très difficile de brosser un portrait de Mohammed Chafik, intellectuel amazigh à la pensée multiple et grand connaisseur non seulement de la culture amazighe, mais aussi d’un nombre important d’autres langues et cultures. Les sciences humaines auxquelles il s’est intéressé – notamment les sciences de l’éducation, l’histoire et la linguistique – ont aussi largement influencé sa pensée.
L’objectif principal de cette contribution est de rendre hommage à ce penseur nord-africain très fidèle à la culture amazighe. Une fidélité qui s’est traduite par une accumulation de recherches, d’études, de livres, sans compter les différentes interviews et conférences à son actif. Il n’a pas non plus hésité à prendre part à de vives polémiques, défendant sans relâche l’amazighité. |
La deuxième finalité de ce travail est de faire connaître à la jeunesse actuelle le parcours d’un Amazigh qui a fondé son militantisme identitaire sur une conscience moderne de l’identité amazighe. Et ce, pour que cette même jeunesse apprenne l’ensemble des valeurs qui ont orienté l’action revendicative de nos grandes personnalités (Mouloud Mammeri, Ali Sidki Azaykou…).
Parcours
Mohammed Chafik est né le 17 septembre 1926 à Ayt Saden près de Fès. Il est l’un des anciens élèves du célèbre collège berbère d’Azrou (juste après l’indépendance, cet établissement portera le nom de Tariq ben Zyad). Il a choisi de travailler dans le domaine civil contrairement à l’ensemble de ses collègues. À signaler que le statut juridique du collège Azrou exige que les lauréats rejoignent normalement l’Académie royale militaire afin de suivre une formation proprement militaire. Et ce, pour être affectés par la suite dans l’armée française en tant qu’officiers.
Mohammed Chafik a obtenu un diplôme en langue arabe, un certificat en langue amazighe, une licence en histoire et un diplôme professionnel en inspection pédagogique. Au début de sa carrière professionnelle, il a travaillé comme enseignant du primaire dans la région de Demnat. En cette qualité, il s’est intéressé à la scolarisation de la fille issue du monde rural en établissant les premières classes dans le village Taysa en 1955.
Il a enseigné aussi à l’Institut des filles musulmanes à Fès. À l’indépendance, il est affecté comme inspecteur de l’enseignement primaire dans différentes villes marocaines avant d’être promu inspecteur régional en 1959, puis inspecteur général de l’enseignement primaire en 1963. En 1967, il est devenu inspecteur principal coordinateur d’histoire et de géographie.
En 1970, M. Chafik a occupé le poste du secrétaire d’État chargé de l’enseignement secondaire, technique, supérieur et de la formation des cadres. Il a gardé le même titre dans le gouvernement formé en août 1971. Du 13 avril au 19 novembre de la même année, il est chargé de mission auprès du Cabinet royal en dirigeant en parallèle le Collège royal.
Durant sa longue carrière, M. Chafik a enseigné l’arabe, le français, l’histoire, la traduction, les sciences de l’éducation, la psychopédagogie, etc. tout en participant à la formation de plusieurs générations d’élèves, d’enseignants, d’inspecteurs, de chercheurs et de militants.
Lors de la fondation de l’Institut royal pour la culture amazighe (Ircam), le 17 octobre 2001, Mohammed Chafik a été nommé son premier recteur. Un poste où il est resté du 14 janvier 2002 jusqu’en novembre 2003. Il est également membre de l’Académie royale depuis 1980 ainsi que du Conseil consultatif des droits de l’Homme (CCDH).
Parcours
Mohammed Chafik est né le 17 septembre 1926 à Ayt Saden près de Fès. Il est l’un des anciens élèves du célèbre collège berbère d’Azrou (juste après l’indépendance, cet établissement portera le nom de Tariq ben Zyad). Il a choisi de travailler dans le domaine civil contrairement à l’ensemble de ses collègues. À signaler que le statut juridique du collège Azrou exige que les lauréats rejoignent normalement l’Académie royale militaire afin de suivre une formation proprement militaire. Et ce, pour être affectés par la suite dans l’armée française en tant qu’officiers.
Mohammed Chafik a obtenu un diplôme en langue arabe, un certificat en langue amazighe, une licence en histoire et un diplôme professionnel en inspection pédagogique. Au début de sa carrière professionnelle, il a travaillé comme enseignant du primaire dans la région de Demnat. En cette qualité, il s’est intéressé à la scolarisation de la fille issue du monde rural en établissant les premières classes dans le village Taysa en 1955.
Il a enseigné aussi à l’Institut des filles musulmanes à Fès. À l’indépendance, il est affecté comme inspecteur de l’enseignement primaire dans différentes villes marocaines avant d’être promu inspecteur régional en 1959, puis inspecteur général de l’enseignement primaire en 1963. En 1967, il est devenu inspecteur principal coordinateur d’histoire et de géographie.
En 1970, M. Chafik a occupé le poste du secrétaire d’État chargé de l’enseignement secondaire, technique, supérieur et de la formation des cadres. Il a gardé le même titre dans le gouvernement formé en août 1971. Du 13 avril au 19 novembre de la même année, il est chargé de mission auprès du Cabinet royal en dirigeant en parallèle le Collège royal.
Durant sa longue carrière, M. Chafik a enseigné l’arabe, le français, l’histoire, la traduction, les sciences de l’éducation, la psychopédagogie, etc. tout en participant à la formation de plusieurs générations d’élèves, d’enseignants, d’inspecteurs, de chercheurs et de militants.
Lors de la fondation de l’Institut royal pour la culture amazighe (Ircam), le 17 octobre 2001, Mohammed Chafik a été nommé son premier recteur. Un poste où il est resté du 14 janvier 2002 jusqu’en novembre 2003. Il est également membre de l’Académie royale depuis 1980 ainsi que du Conseil consultatif des droits de l’Homme (CCDH).
Un homme d’ouverture
Alors qu’une grande partie de l’intelligentsia nord-africaine se tournait vers l’Occident ou l’Orient, Mohammed Chafik était l’un des rares intellectuels marocains à appeler à une réconciliation avec le patrimoine amazigh de nos ancêtres et à revendiquer une préservation institutionnelle des fondements historiques, culturels et identitaires du Tamazgha (Afrique du Nord). Cet appel à la revalorisation de l’identité amazighe a fait de Mohammed Chafik l’un des premiers défenseurs de la langue et la culture amazighes. Son objectif était d’aboutir à une reconnaissance officielle de la part de l’État et de la société de la diversité caractérisant l’identité nord-africaine.Le combat de Mohammed Chafik est marqué par la diversité des méthodes adoptées et des chemins parcourus. Il a commencé par le domaine de l’édition vers la fin des années 60 avec la publication d’une série d’articles portant sur les significations profondes de la culture amazighe et son lien – comme culture nationale – avec la lutte contre la colonisation. Le premier de ces articles est publié dans le cinquième numéro de la revue Afaq (horizons) éditée en 1967 par l’Union des écrivains du grand Maghreb qui portait à cette époque-là le nom de la Maison de la pensée présidée par Mohammed Aziz Lahbabi et dont Mouloud Mammeri était membre.
Le dit article était intitulé : De notre patrimoine inconnu : une brève classification des chants et danses berbères, suivi d’une autre étude qui porte comme titre De notre patrimoine inconnu : des poèmes amazighes en enthousiasme national. Cette étude a été publiée dans le sixième numéro de la revue précitée. Or les objectifs attendus de ces deux articles n’ont pas été atteints, chose reconnue par Mohammed Chafik lui-même lorsqu’il s’est interrogé à propos de leur impact sur la position des intellectuels de l’époque. Il était évident que ceux-ci n’avaient pas encore intégré l’idée de repenser l’identité marocaine en prenant en considération la composante amazighe. |
Après ce premier échec du dialogue avec les intellectuels marocains représentés dans la Maison de la pensée, Mohammed Chafik s’est rendu compte qu’il était inutile de dialoguer avec des gens qui ont adopté l’idéologie du nationalisme arabes. Il s’est orienté en conséquence vers les intellectuels appartenant au courant islamique. Il a essayé de leur expliquer que l’Islam est une religion universelle non limitée à la seule ethnie arabe. Ainsi, selon Mohammed Chafik, la force de la religion islamique réside dans son appel à la tolérance et non pas dans la supériorité d’une ethnie au détriment d’une autre.
Il a commencé ce dialogue avec les islamistes marocains vers le début des années soixante-dix par la publication des deux ouvrages importants qui sont Pensées sous-développées en 1972 et Ce que dit le muezzin en 1974. La nature du discours véhiculé à cette époque avec l’émergence du nationalisme arabe a facilité une large diffusion des idées qui sont loin de la réalité de l’Islam. Comme le fait de dire que cette religion universelle a principalement une dimension ethnique arabe, ou qu’elle recommande l’arabisation des peuples qui ne sont pas arabes… Ces fausses idées très en vogue chez le courant arabo-islamique, sont réfutées par l’académicien Mohammed Chafik qui utilise souvent – au niveau de ses écrits et ses interventions culturelles – des versets coraniques et des dits du prophète Mohammed qui appellent à l’égalité linguistique, l’amitié entre les peuples, l’apprentissage des différentes langues, la tolérance…
En 1978, Mohammed Chafik a adressé au gouvernement marocain à titre personnel un rapport revendicatif intitulé Rapport sur la nécessité de la promotion de la langue amazighe et son enseignement à l’ensemble des Marocains, dans lequel il a déterminé les raisons qui nécessitent l’étude ainsi que l’enseignement de la langue amazighe. Il a dressé un plan opérationnel dans le but de réussir l’apprentissage de cette langue. Le dit rapport stipule que la première étape dans ce processus est la création d’un institut supérieur, puis l’instauration des chaires de langue et culture amazighes dans les facultés de lettres, ensuite l’enseignement de l’amazigh dans les lycées et enfin son enseignement dans le cycle primaire comme dernière étape.
Malgré ses appels au dialogue, les intellectuels du courant arabo-islamique refusent les nouvelles idées sur la question culturelle exprimées par Chafik. Face à ce refus, il n’a trouvé refuge que chez les intellectuels militants des droits de l’homme. Ceux-ci ont intégré la revendication des libertés identitaires dans le cadre de la diversité culturelle, et ont appelé à sa préservation. Le seul problème, c’est qu’ils étaient très rares !
Un chercheur acharné
À cette époque, Chafik a continué ses travaux d’édition et de recherche sur des questions concernant principalement la langue amazighe ainsi que l’histoire des Amazighs. Il a publié une série d’études académiques sur l’amazigh dans la revue éditée par l’Institut universitaire pour la recherche scientifique intitulée Albahtou alàilmi (La recherche scientifique), ainsi que dans la revue Alakadimiyya (L’Académie) éditée par l’Académie du royaume du Maroc. Une des ses œuvres les plus importantes est le livre traitant de l’histoire oubliée des Amazighs : Lamhatoun àan 33 qarnan min tarikh alamazighiyyin (Aperçu sur 33 siècles de l’histoire des Amazighs) en 1989. L’auteur a brisé toute une série de tabous qui entourent l’histoire du peuple amazigh. Il a enrichi aussi la bibliothèque amazighe d’un dictionnaire bilingue arabe-amazigh en trois tomes en 1990 et d’un manuel d’apprentissage de la langue amazighe, 44 darsan fi alloughati alamazighiyya (44 leçons en langue amazighe) en 1991.
Mohammed Chafik a fondé, avec des amis amazighs, la revue Tifawt qui s’intéresse à la civilisation amazighe, où il a signé plusieurs articles sous le pseudonyme Mouhouch. Il a publié aussi des études importantes sur l’identité amazighe dans les deux encyclopédies marocaines très connues : Mémoires du patrimoine marocain et Encyclopédie du Maroc sous la supervision de Ahmed Taoufik et Ahmed Hajji de l’Association marocaine pour l’édition et la traduction. En plus, il a publié Addarija almaghribiyya : majalou tawaroud bayna alamazighiyya wa alàarabiyya (Le dialecte arabe marocain : un domaine de contact entre l’amazigh et l’arabe), Alloughatou alamazighiyya : binyatouha allisaniyya (La langue amazighe et sa structure linguistique), Min ajli magharib magharibiyya bilawlawiyya (Pour un Maghreb d’abord maghrébin) aux éditions Tariq ben Ziyyad en 2000.
L’homme du Manifeste amazigh
L’année 2000 est marquée par du nouveau concernant l’itinéraire revendicatif du Mohammed Chafik. Il rédige en effet un document très important intitulé Un manifeste pour la reconnaissance officielle de l’amazighité du Maroc. Largement diffusé, ce document historique – connu aussi sous le nom de Manifeste amazigh – a clairement expliqué les sept revendications clés du mouvement culturel amazigh qui sont : l’ouverture d’un dialogue national autour de l’amazigh ; la reconnaissance constitutionnelle de l’amazigh comme langue nationale et officielle ; le développement économique des régions amazighes ; l’enseignement de la langue amazighe ; la récriture de l’histoire marocaine ; la valorisation de l’amazigh dans les mass media officiels ; la valorisation des arts amazighs ; l’arrêt immédiat de l’arabisation touchant les régions des Amazighs ; l’encouragement des associations ainsi que la presse amazighes en leur reconnaissant leur utilité publique et en leur accordant le soutien financier et logistique… Le dit manifeste est signé par un million d’activistes amazighs, ce qui prouve que Mohammed Chafik est l’homme d’unanimité au sein du mouvement culturel amazigh.
Dans le domaine associatif, Chafik a participé à la création de plusieurs associations défendant l’identité amazighe, dont l’association des anciens élèves du collège d’Azrou qu’il a présidée de 1960 jusqu’à 1965. C’est souvent lui qui préface les numéros de son bulletin interne (Tarik). En 1979, il participe à la création de l’association culturelle amazighe en 1979 en compagnie de Ali Sidki Azaykou, Abdelhamid Zammouri et d’autres. En 1990, il fonde l’association Agraw avec Zammori, Oussadden, Ammar, Azaykou, Amahan, Oudades, Kabri, Akkouri, Ighraz, Ajaajaa. Malheureusement ce cadre associatif n’a pas pu obtenir le récépissé de son dossier administratif auprès du ministère de l’Intérieur…
Grâce à l’ensemble de ses efforts comme intellectuel et militant, Mohammed Chafik a obtenu, en 2002, le prix du prince hollandais Claus. Il est ainsi devenu le deuxième amazigh obtenant ce prix international après l’humoriste amazigh de nationalité algérienne, Fellag.
Il a commencé ce dialogue avec les islamistes marocains vers le début des années soixante-dix par la publication des deux ouvrages importants qui sont Pensées sous-développées en 1972 et Ce que dit le muezzin en 1974. La nature du discours véhiculé à cette époque avec l’émergence du nationalisme arabe a facilité une large diffusion des idées qui sont loin de la réalité de l’Islam. Comme le fait de dire que cette religion universelle a principalement une dimension ethnique arabe, ou qu’elle recommande l’arabisation des peuples qui ne sont pas arabes… Ces fausses idées très en vogue chez le courant arabo-islamique, sont réfutées par l’académicien Mohammed Chafik qui utilise souvent – au niveau de ses écrits et ses interventions culturelles – des versets coraniques et des dits du prophète Mohammed qui appellent à l’égalité linguistique, l’amitié entre les peuples, l’apprentissage des différentes langues, la tolérance…
En 1978, Mohammed Chafik a adressé au gouvernement marocain à titre personnel un rapport revendicatif intitulé Rapport sur la nécessité de la promotion de la langue amazighe et son enseignement à l’ensemble des Marocains, dans lequel il a déterminé les raisons qui nécessitent l’étude ainsi que l’enseignement de la langue amazighe. Il a dressé un plan opérationnel dans le but de réussir l’apprentissage de cette langue. Le dit rapport stipule que la première étape dans ce processus est la création d’un institut supérieur, puis l’instauration des chaires de langue et culture amazighes dans les facultés de lettres, ensuite l’enseignement de l’amazigh dans les lycées et enfin son enseignement dans le cycle primaire comme dernière étape.
Malgré ses appels au dialogue, les intellectuels du courant arabo-islamique refusent les nouvelles idées sur la question culturelle exprimées par Chafik. Face à ce refus, il n’a trouvé refuge que chez les intellectuels militants des droits de l’homme. Ceux-ci ont intégré la revendication des libertés identitaires dans le cadre de la diversité culturelle, et ont appelé à sa préservation. Le seul problème, c’est qu’ils étaient très rares !
Un chercheur acharné
À cette époque, Chafik a continué ses travaux d’édition et de recherche sur des questions concernant principalement la langue amazighe ainsi que l’histoire des Amazighs. Il a publié une série d’études académiques sur l’amazigh dans la revue éditée par l’Institut universitaire pour la recherche scientifique intitulée Albahtou alàilmi (La recherche scientifique), ainsi que dans la revue Alakadimiyya (L’Académie) éditée par l’Académie du royaume du Maroc. Une des ses œuvres les plus importantes est le livre traitant de l’histoire oubliée des Amazighs : Lamhatoun àan 33 qarnan min tarikh alamazighiyyin (Aperçu sur 33 siècles de l’histoire des Amazighs) en 1989. L’auteur a brisé toute une série de tabous qui entourent l’histoire du peuple amazigh. Il a enrichi aussi la bibliothèque amazighe d’un dictionnaire bilingue arabe-amazigh en trois tomes en 1990 et d’un manuel d’apprentissage de la langue amazighe, 44 darsan fi alloughati alamazighiyya (44 leçons en langue amazighe) en 1991.
Mohammed Chafik a fondé, avec des amis amazighs, la revue Tifawt qui s’intéresse à la civilisation amazighe, où il a signé plusieurs articles sous le pseudonyme Mouhouch. Il a publié aussi des études importantes sur l’identité amazighe dans les deux encyclopédies marocaines très connues : Mémoires du patrimoine marocain et Encyclopédie du Maroc sous la supervision de Ahmed Taoufik et Ahmed Hajji de l’Association marocaine pour l’édition et la traduction. En plus, il a publié Addarija almaghribiyya : majalou tawaroud bayna alamazighiyya wa alàarabiyya (Le dialecte arabe marocain : un domaine de contact entre l’amazigh et l’arabe), Alloughatou alamazighiyya : binyatouha allisaniyya (La langue amazighe et sa structure linguistique), Min ajli magharib magharibiyya bilawlawiyya (Pour un Maghreb d’abord maghrébin) aux éditions Tariq ben Ziyyad en 2000.
L’homme du Manifeste amazigh
L’année 2000 est marquée par du nouveau concernant l’itinéraire revendicatif du Mohammed Chafik. Il rédige en effet un document très important intitulé Un manifeste pour la reconnaissance officielle de l’amazighité du Maroc. Largement diffusé, ce document historique – connu aussi sous le nom de Manifeste amazigh – a clairement expliqué les sept revendications clés du mouvement culturel amazigh qui sont : l’ouverture d’un dialogue national autour de l’amazigh ; la reconnaissance constitutionnelle de l’amazigh comme langue nationale et officielle ; le développement économique des régions amazighes ; l’enseignement de la langue amazighe ; la récriture de l’histoire marocaine ; la valorisation de l’amazigh dans les mass media officiels ; la valorisation des arts amazighs ; l’arrêt immédiat de l’arabisation touchant les régions des Amazighs ; l’encouragement des associations ainsi que la presse amazighes en leur reconnaissant leur utilité publique et en leur accordant le soutien financier et logistique… Le dit manifeste est signé par un million d’activistes amazighs, ce qui prouve que Mohammed Chafik est l’homme d’unanimité au sein du mouvement culturel amazigh.
Dans le domaine associatif, Chafik a participé à la création de plusieurs associations défendant l’identité amazighe, dont l’association des anciens élèves du collège d’Azrou qu’il a présidée de 1960 jusqu’à 1965. C’est souvent lui qui préface les numéros de son bulletin interne (Tarik). En 1979, il participe à la création de l’association culturelle amazighe en 1979 en compagnie de Ali Sidki Azaykou, Abdelhamid Zammouri et d’autres. En 1990, il fonde l’association Agraw avec Zammori, Oussadden, Ammar, Azaykou, Amahan, Oudades, Kabri, Akkouri, Ighraz, Ajaajaa. Malheureusement ce cadre associatif n’a pas pu obtenir le récépissé de son dossier administratif auprès du ministère de l’Intérieur…
Grâce à l’ensemble de ses efforts comme intellectuel et militant, Mohammed Chafik a obtenu, en 2002, le prix du prince hollandais Claus. Il est ainsi devenu le deuxième amazigh obtenant ce prix international après l’humoriste amazigh de nationalité algérienne, Fellag.
L’érudit prolixe
Dans le cadre de son travail sur l’histoire des Amazighs, M. Chafik s’est intéressé à deux thèses essentielles : les contributions du peuple amazigh à la construction des grandes civilisations qu’a connues les deux rives de la Méditerranée, et la falsification qui a touché son histoire. À ce sujet, les deux problématiques sur lesquelles il a beaucoup travaillé sont : le nom du peuple amazigh et son origine. Pour la première problématique, il a prouvé que le peuple amazigh porte depuis plus de 3000 ans le nom authentique d’Imazighen (les hommes libres). Quant à celles des origines, il a signalé que l’histoire, l’archéologie, l’anthropologie et la linguistique ont montré que les Amazighs sont d’origine africaine. Ce continent – comme l’indique d’ailleurs son nom amazigh Ifriqiya – est leur terre autochtone depuis plus de 9000 ans.
Linguistiquement, Chafik a travaillé d’une manière approfondie sur les sujets de la langue amazighe sous deux angles : le culturel et le lexical. Il a utilisé la notion awal amazigh empruntée à l’historien Lahcen Elwazzan (Léon l’africain) afin d’indiquer que cet awal est un facteur de civilisation et de culture qui a formé l’âme, la pensée ainsi que l’authenticité marocaines. Cette préoccupation exprimée à l’égard de l’amazigh ne serait réalisable si Chafik n’avait pas adopté la définition anthropologique du mot « culture », cette définition moderne qui intègre un nombre important d’éléments : les coutumes, les traditions, les choix sociaux, les arts, la musique, la littérature orale, la langue… |
Cette préoccupation avait comme points de repère les principes suivants :
Dans le cadre des principes cités ci-dessus, Chafik a travaillé durant près de quatre décennies à la préparation d’un dictionnaire bilingue arabe-amazigh en trois tomes. Ce travail titanesque révèle la grande richesse de la langue amazighe.
À travers son itinéraire de militant, Mohamed Chafik n’a utilisé que les moyens légitimes du militantisme, en l’occurrence le dialogue et la recherche scientifique. Notre académicien reste l’un des rares intellectuels marocains à avoir défendu l’identité marocaine dans sa diversité et sa richesse.
- la langue amazighe a une histoire très ancienne ;
- la langue amazighe est une langue qui a ses dialectes ;
- la langue amazighe a une unité dans l’espace et dans le temps ;
- la langue amazighe est une langue vivante et ouverte.
Dans le cadre des principes cités ci-dessus, Chafik a travaillé durant près de quatre décennies à la préparation d’un dictionnaire bilingue arabe-amazigh en trois tomes. Ce travail titanesque révèle la grande richesse de la langue amazighe.
À travers son itinéraire de militant, Mohamed Chafik n’a utilisé que les moyens légitimes du militantisme, en l’occurrence le dialogue et la recherche scientifique. Notre académicien reste l’un des rares intellectuels marocains à avoir défendu l’identité marocaine dans sa diversité et sa richesse.
Bibliographie regroupant la production culturelle de Mohammed Chafik
Ouvrages
Études
Interviews
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Discours
Articles
Rapports
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