BER | FRA
Ahmed u Namir
Traduction française : Abdellah GABOUNE et Khadija BOULMEDARAT
Il était une fois un jeune garçon beau et intelligent, qui s’appelait Ahmed u Namir. Il avait perdu son père très jeune, sa mère s’occupait de lui et faisait tout pour le rendre heureux. Elle voyait en lui l’image de son défunt père. Il était d’une beauté incomparable, qui le rendait irrésistible aux yeux de toutes les jeunes filles du village.Il fréquentait l’école coranique dès son plus jeune âge, et apprit le livre saint avec une aisance et une rapidité extraordinaires. Le fqqih lui prévoyait un avenir prospère.
Les années s’écoulèrent et le jeune garçon devint un homme beau et fort. Toutes les jeunes filles l’approchaient, ne serait ce que pour obtenir de lui quelques mots aimables. Elles rêvaient toutes d’être son épouse.
Ahmed u Namir s’était entouré d’un grand mystère, qu’il gardait secret. Il se réveillait chaque matin les mains ornées de henné. Il évitait son maître par crainte qu’il ne découvrît son secret.
Comme chaque soir, avant de quitter l’école, Ahmed u Namir revoyait ses récitations ; ce soir là ce qu’il craignait tant arriva : le fqqih aperçut ses mains ornées de henné. Il lui dit : " Montre tes mains ! Comment oses-tu faire cela ? Tu n’es pas une fille ou une femme, je suppose ".
Ahmed u Namir essaya d’expliquer en vain ce mystère à son maître, celui-ci était déçu de voir son meilleur élève lui faire une telle offense. Le fqqih fixa longuement les dessins et se livra à une profonde réflexion. Il réalisa alors que ces ornements ne pouvaient être l’œuvre d’un être humain, mais celle d’une houri. Il présenta ses excuses à son élève et lui dit : " La nuit reste éveillé, prend avec toi une aiguille et du fil. Quand les houris viendront, tu commenceras à coudre en faisant semblant de dormir ".
Les années s’écoulèrent et le jeune garçon devint un homme beau et fort. Toutes les jeunes filles l’approchaient, ne serait ce que pour obtenir de lui quelques mots aimables. Elles rêvaient toutes d’être son épouse.
Ahmed u Namir s’était entouré d’un grand mystère, qu’il gardait secret. Il se réveillait chaque matin les mains ornées de henné. Il évitait son maître par crainte qu’il ne découvrît son secret.
Comme chaque soir, avant de quitter l’école, Ahmed u Namir revoyait ses récitations ; ce soir là ce qu’il craignait tant arriva : le fqqih aperçut ses mains ornées de henné. Il lui dit : " Montre tes mains ! Comment oses-tu faire cela ? Tu n’es pas une fille ou une femme, je suppose ".
Ahmed u Namir essaya d’expliquer en vain ce mystère à son maître, celui-ci était déçu de voir son meilleur élève lui faire une telle offense. Le fqqih fixa longuement les dessins et se livra à une profonde réflexion. Il réalisa alors que ces ornements ne pouvaient être l’œuvre d’un être humain, mais celle d’une houri. Il présenta ses excuses à son élève et lui dit : " La nuit reste éveillé, prend avec toi une aiguille et du fil. Quand les houris viendront, tu commenceras à coudre en faisant semblant de dormir ".
Le jeune homme s’enferma dans sa chambre et suivit les conseils de son maître. A une heure tardive de la nuit, les houris firent leur apparition et comme à leur habitude, elles commencèrent à orner les mains de Ahmed u Namir.
A l’aube, les houris décidèrent de regagner le septième ciel quand elles réalisèrent qu’elles étaient prises au piège. Chacune essaya de convaincre Ahmed u Namir de la libérer. Parmi elles, une très belle houri attira son attention. Il décida de libérer les quatre autres et de ne garder qu’elle. Ahmed u Namir tomba fou amoureux de la houri et finit par l’épouser. Elle ne lui demanda qu’une faveur : lui construire un palais où elle puisse vivre en paix sans jamais être dérangée. Les années s’écoulèrent et la houri tomba enceinte. Mais elle mourait d’ennui seule dans ce palais ; un jour elle dit à Ahmed u Namir : " Je suis lasse de t’attendre ici toute la journée pendant que tu es ailleurs. J’aimerai bien voir le ciel à travers la lucarne ". |
Ne supportant plus de faire souffrir davantage son épouse, Ahmed u Namir exauça son vœu et ouvra la lucarne. Mais aussitôt qu’elle vit le ciel, elle s’envola et laissa à son cher époux que son alliance.
Les jours, les semaines, les mois s’écoulèrent. Ahmed u Namir finit par comprendre le chagrin de sa femme ; il comprit que sa mère en était l’origine. Il découvrit que sa mère avait réussi à pénétrer dans le palais, et qu’elle s’en était prise à sa chère épouse en la traitant de tous les noms. Ahmed u Namir souffrait terriblement, son état s’aggravait de jour en jour, il perdait l’appétit et était devenu très chétif. Il finit par plonger dans un profond mutisme.
Un jour il décida de partir en voyage, il salua chaleureusement sa mère et sella son cheval. Il parcourut les plaines et les montagnes. Fatigué, il s’arrêta dans un village où il rencontra un vieil homme d’une grande sagesse. Ahmed u Namir lui raconta son histoire. Le vieil homme lui parla d’une mystérieuse montagne, qu’il lui indiqua. Il lui dit : " Mon fils, au sommet de cette montagne tu trouveras un aigle. Il peut t’emmener au septième ciel, pourvu que tu te soumettes à ses exigences ". Ahmed u Namir remonta sur son cheval et se dirigea vers cette fameuse montagne.
Arrivé à cette montagne, son cœur battait très fort, des frissons le gagnaient, des larmes coulaient sur son visage : il se rappela sa chère épouse.
Las de parcourir les plaines et les montagnes, Ahmed u Namir décida de se reposer quelques instants pour reprendre des forces. Il se mit à chanter.
Des aiglons dans leur nid l’entendirent, au sommet de la montagne. Il avertirent leur père, le vieil aigle, qui ne leur prêta aucune attention. Les petits insistèrent, ce qui fâcha le vieil aigle. Pour leur donner une bonne leçon, d’un coup de bec il les jeta tous hors du nid. Ahmed u Namir recueillit les petits aiglons, les nourrit et les protégea contre le froid et les autres prédateurs.
Trois jours s’étaient écoulés et les aiglons commençaient à manquer à leur père. Il décida d’aller les chercher au pied de la falaise. Il découvrit un homme, qui était en train de s’occuper de ses petits. L’aigle descendit chez Ahmed u Namir, et lui dit :
— Tu as bien fait de nourrir mes petits, sans quoi je ne te laisserai pas en vie. Dis-moi ce qui t’amène ici ?
— Je te supplie, dit Ahmed, tu es le seul être qui puisse m’emmener voir ma houri au septième ciel.
— Je veux bien exaucer ton vœu, mais j’ai besoin de toutes mes forces pour arriver au septième ciel. Il me faut sept morceaux de viande et sept bouts de roseaux remplis de sang.Ahmed u Namir plongea dans ses pensées, les yeux fixés sur son cheval, son fidèle compagnon. Ce dernier devina les pensées de son maître et accepta d’être sacrifié.
Le jour fixé arriva, Ahmed prit les commissions comme convenu. L’aigle parcourut le ciel de son regard et trouva que c’était un jour propice pour l’envol. Par imprudence, Ahmed perdit un morceau de viande, alors il en coupa un autre de sa hanche et le donna à l’aigle. Ce dernier sentit aussitôt que c’était de la chaire humaine, il voulut lâcher Ahmed u Namir dans les airs lorsqu’il se rappela ce qu’il avait fait pour ses petits.
En arrivant au septième ciel, Ahmed u Namir retrouva le sourire. Debout à côté de la source où les servantes venaient chercher de l’eau, il observait le paysage paradisiaque. Pour mieux l’admirer, il monta dans un arbre. Aussitôt installé sur une branche, une servante vint remplir sa cruche d’eau. Elle vit le reflet de Ahmed u Namir dans l’eau. Elle l’observait et se rappela la description de cet homme faite par sa maîtresse. Ahmed u Namir descendit de l’arbre et engagea la conversation avec la servante. Il laissa tomber sa bague dans la cruche d’eau et lui dit : " Vous versez de l’eau jusqu’il en reste un peu dans la cruche et vous le donnerez à boire à votre maîtresse ".
La servante exécuta l’ordre du jeune homme. La houri vit son alliance et la reconnut aussitôt. Elle a trouva une ruse pour faire entrer son époux dans le palais des houris. La servante mit Ahmed u Namir dans un fagot en bois et le transporta sur le dos d’une jument vers le palais.
Ahmed u Namir sortit de sa cachette et retrouva à nouveau sa chère épouse. Ils se regardèrent tendrement puis s’embrassèrent. Le petit enfant contempla longuement l’étreinte de ses parents et courut vers eux.
Ahmed u Namir était envahi par une joie immense, son épouse retrouva le bonheur.
Il était comblé, jusqu’au jour où il tomba malade, et une grande tristesse le gagna. Son état s’accentua lorsqu’il se rappela sa mère. Elle avait sacrifié sa jeunesse pour l’élever. Son désir de la voir devint si fort qu’il pensa transgresser l’interdit, il pensa alors à la pierre dont lui avait parlé son épouse. Cette pierre cache un trou au travers duquel on peut voir la terre, cet endroit était interdit aux humains.
Il souleva la pierre avec force et vit sa mère au milieu du patio de la maison. C’était le jour de la fête du sacrifice, sa mère tenait un bélier et attendait l’arrivée de son fils pour accomplir le rituel du sacrifice.
Ahmed se sentit coupable de laisser sa mère ainsi, il lança son glaive mais celui-ci ne parvint pas à elle. Il se mit à réfléchir un instant et il s’écria : " je te rejoins, ma mère, je n’ai que toi monde".
Ahmed u Namir sauta du trou et dévala les cieux. Par miracle une goutte de son sang atterrit sur le cou du bélier et l’égorgea.
Le symbole de l’amour est mort mais la morale de toute une histoire vient de naître.
Les jours, les semaines, les mois s’écoulèrent. Ahmed u Namir finit par comprendre le chagrin de sa femme ; il comprit que sa mère en était l’origine. Il découvrit que sa mère avait réussi à pénétrer dans le palais, et qu’elle s’en était prise à sa chère épouse en la traitant de tous les noms. Ahmed u Namir souffrait terriblement, son état s’aggravait de jour en jour, il perdait l’appétit et était devenu très chétif. Il finit par plonger dans un profond mutisme.
Un jour il décida de partir en voyage, il salua chaleureusement sa mère et sella son cheval. Il parcourut les plaines et les montagnes. Fatigué, il s’arrêta dans un village où il rencontra un vieil homme d’une grande sagesse. Ahmed u Namir lui raconta son histoire. Le vieil homme lui parla d’une mystérieuse montagne, qu’il lui indiqua. Il lui dit : " Mon fils, au sommet de cette montagne tu trouveras un aigle. Il peut t’emmener au septième ciel, pourvu que tu te soumettes à ses exigences ". Ahmed u Namir remonta sur son cheval et se dirigea vers cette fameuse montagne.
Arrivé à cette montagne, son cœur battait très fort, des frissons le gagnaient, des larmes coulaient sur son visage : il se rappela sa chère épouse.
Las de parcourir les plaines et les montagnes, Ahmed u Namir décida de se reposer quelques instants pour reprendre des forces. Il se mit à chanter.
Des aiglons dans leur nid l’entendirent, au sommet de la montagne. Il avertirent leur père, le vieil aigle, qui ne leur prêta aucune attention. Les petits insistèrent, ce qui fâcha le vieil aigle. Pour leur donner une bonne leçon, d’un coup de bec il les jeta tous hors du nid. Ahmed u Namir recueillit les petits aiglons, les nourrit et les protégea contre le froid et les autres prédateurs.
Trois jours s’étaient écoulés et les aiglons commençaient à manquer à leur père. Il décida d’aller les chercher au pied de la falaise. Il découvrit un homme, qui était en train de s’occuper de ses petits. L’aigle descendit chez Ahmed u Namir, et lui dit :
— Tu as bien fait de nourrir mes petits, sans quoi je ne te laisserai pas en vie. Dis-moi ce qui t’amène ici ?
— Je te supplie, dit Ahmed, tu es le seul être qui puisse m’emmener voir ma houri au septième ciel.
— Je veux bien exaucer ton vœu, mais j’ai besoin de toutes mes forces pour arriver au septième ciel. Il me faut sept morceaux de viande et sept bouts de roseaux remplis de sang.Ahmed u Namir plongea dans ses pensées, les yeux fixés sur son cheval, son fidèle compagnon. Ce dernier devina les pensées de son maître et accepta d’être sacrifié.
Le jour fixé arriva, Ahmed prit les commissions comme convenu. L’aigle parcourut le ciel de son regard et trouva que c’était un jour propice pour l’envol. Par imprudence, Ahmed perdit un morceau de viande, alors il en coupa un autre de sa hanche et le donna à l’aigle. Ce dernier sentit aussitôt que c’était de la chaire humaine, il voulut lâcher Ahmed u Namir dans les airs lorsqu’il se rappela ce qu’il avait fait pour ses petits.
En arrivant au septième ciel, Ahmed u Namir retrouva le sourire. Debout à côté de la source où les servantes venaient chercher de l’eau, il observait le paysage paradisiaque. Pour mieux l’admirer, il monta dans un arbre. Aussitôt installé sur une branche, une servante vint remplir sa cruche d’eau. Elle vit le reflet de Ahmed u Namir dans l’eau. Elle l’observait et se rappela la description de cet homme faite par sa maîtresse. Ahmed u Namir descendit de l’arbre et engagea la conversation avec la servante. Il laissa tomber sa bague dans la cruche d’eau et lui dit : " Vous versez de l’eau jusqu’il en reste un peu dans la cruche et vous le donnerez à boire à votre maîtresse ".
La servante exécuta l’ordre du jeune homme. La houri vit son alliance et la reconnut aussitôt. Elle a trouva une ruse pour faire entrer son époux dans le palais des houris. La servante mit Ahmed u Namir dans un fagot en bois et le transporta sur le dos d’une jument vers le palais.
Ahmed u Namir sortit de sa cachette et retrouva à nouveau sa chère épouse. Ils se regardèrent tendrement puis s’embrassèrent. Le petit enfant contempla longuement l’étreinte de ses parents et courut vers eux.
Ahmed u Namir était envahi par une joie immense, son épouse retrouva le bonheur.
Il était comblé, jusqu’au jour où il tomba malade, et une grande tristesse le gagna. Son état s’accentua lorsqu’il se rappela sa mère. Elle avait sacrifié sa jeunesse pour l’élever. Son désir de la voir devint si fort qu’il pensa transgresser l’interdit, il pensa alors à la pierre dont lui avait parlé son épouse. Cette pierre cache un trou au travers duquel on peut voir la terre, cet endroit était interdit aux humains.
Il souleva la pierre avec force et vit sa mère au milieu du patio de la maison. C’était le jour de la fête du sacrifice, sa mère tenait un bélier et attendait l’arrivée de son fils pour accomplir le rituel du sacrifice.
Ahmed se sentit coupable de laisser sa mère ainsi, il lança son glaive mais celui-ci ne parvint pas à elle. Il se mit à réfléchir un instant et il s’écria : " je te rejoins, ma mère, je n’ai que toi monde".
Ahmed u Namir sauta du trou et dévala les cieux. Par miracle une goutte de son sang atterrit sur le cou du bélier et l’égorgea.
Le symbole de l’amour est mort mais la morale de toute une histoire vient de naître.